Des sources (textuelles, iconographiques ...) sur l'équipement des piétons et miliciens du début du XIIIème siècle
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Reinhardt
 
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Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Reinhardt » Sam Avr 24, 2010 9:09 pm

Suite à la remarque du Goupil dans "point photo" je lance ce nouveau débat ici.

Il y a déjà quelque temps nous discutions de la relatvie rareté de l'épée : souvent citée comme arme de noble, souvent (systématiquement ?) écartée du kit du soldat "pauvre" dans les troupes de reconstitution, j'aimerais faire un point sur sa valeur réelle au XIIIe.
De même que celle du haubert, ou du moins de la protection de mailles.

J'ai déjà lu dans le Contamine entr'autrers, mais également dans divers ouvrages de Gaier qu'on peut trouver des épées valant 3 sous.
De même, j'ai été surpris par le coût relativement faible d'un équipement de mailles au XIIIe dans le Contamine. Exemple, un équipement constitué d'un haubert + gambeson + miton + bassinet : 1120 deniers, soit 93 jours de solde pour un soldat à pieds, ce qu'on appelle communément le "soldat pauvre", celui-là même qui gagne quand même 12 deniers par jour, excusez du peu.

Plusieurs points sont à soulever dans cette problématique : je m'étais déjà exprimé sur ce sujet sur le forum GMA, mais le "soldat pauvre" n'est pas, à mon avis, une réalité historique : un soldat gagne extrêmement bien sa vie comparé aux 90 % de gens qui composent le reste du monde médiéval (paysans, petits artisans, moines...) mais certes, il gagne moins bien sa vie que les 2-3 % de "grands" (seigneurs, abbés, évêques, chevaliers...) ; disons que toutes proportions gardées, on pourrait considérer un "soldat pauvre" comme à peu près l'équivalent d'un directeur régional d'une banque. Je n'aime pas ces comparaisons car elles sont forcément erronnées, mais c'est pour donner une échelle de grandeur.
De plus, le soldat est logé, peut-être même nourri par son seigneur, juridiquement couvert par ce dernier, et peut en outre s'arrondir les fins de calendes par les prises de guerre et pots de vins éventuels.

Bref, tout ceci pour dire qu'un soldat "pauvre" n'est pas forcément la réalité historique la plus juste qui soit.

Ensuite si on recoupe avec les sources visuelles (statues, enluminures, vitraux) : les armes d'hast et les gambesons apparaissent sous représentés par rapport à nos reconstitutions modernes. On représente plus souvent le soldat à pieds vêtu de mailles et armé d'une épée que vêtu d'un gambeson et armé d'une lance. Dans la bible en skis par exemple, je m'étais amusé à faire un comptage, et 50 % environ des soldats à pieds sont représentés en mailles. L'arme la plus représentée entre leurs mains est d'ailleurs l'épée.

Enfin les sources écrites telles que chroniques de batailles, comptes des arsenaux (étudiés en détails par Ranulf, je lui laisserai le soin d'étayer tout ceci plus en détails) ou comptes des dépenses de guerres des seigneurs laissent apparaitre que le haubert ou du moins la protection de mailles représenterait environ 50 % des protections de soldats à pieds.
Le récit de la campagne de Philippe IV en Flandres relaté par Guillaume Guiart ("La Branche des Royaux Lignages") mentionne des gambesons, mais apparemment pour les soldats de loin les plus pauvres (le contexte laisserait entendre qu'ils ne seraient pas majoritaires de l'armée) et l'arme la plus présente entre leurs mains est l'épée, puisque l'auteur précise qu'elle est entre quasiment toutes les mains. Il stipule également que les soldats redressent les lames après les combats, "réparent" les épées endommagées, les gardes etc... ce qui laisserait là aussi supposer qu'il s'agit d'armes de piètre qualité.


Voilà.
Le débat est lancé, que pensez-vous de ceci, disposez-vous de sources venant confirmer ou au contraire contester cette théorie ?
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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede RANULF » Dim Avr 25, 2010 9:29 am

Le sujet n’est pas simple car nous sommes fortement influencés par les visions des historiens du XXème siècle. De plus l’ichnographie du XIIIème est très codifiée, donc seule elle n’est pas réellement exploitable. Pour répondre à la question il faut travailler sur plusieurs types de sources : comptes, liste des arsenaux, chroniques, vitraux, statuaire et enluminures, chroniques… Comme pour la plupart des sujets seul un recoupement de ces différentes sources pourra apporter du nouveau sur ce point. Par exemple dans de nombreuses batailles XIIIème on parle de « mur de piques », alors que cette arme n’est pas forcément très représentés en iconographie, à noter aussi que l’on évoque très régulièrement des formations démontrant un haut degré d’organisation*. Personnellement je n’aime pas la notion de soldat pauvre, je préfère la notion de soldat occasionnel et soldat « régulier ». Ceux que nous appelons soldats pauvres devaient probablement plus s’occuper de la logistique et ne combattre que rarement excepté sur des opérations ponctuelles de harcèlement, et dans ce cas on peut se demander s’ils n’étaient pas équipés avec le matériel des arsenaux ? Donc « ne reste plus qu’à » faire un gros déballage de sources brut de fonderie sans plus de commentaire. :crazy:
Ensuite nous aurons le plaisir d’analyser ça tous ensemble. [img]images/icones/icon7.gif[/img]
Reinhardt as-tu toujours le mémo que je t’avais envoyé sur l’armée de Philippe II ?
Au risque de faire bondir certains d’entre vous je trouve que certains historiens de la fin XIXème ou début du XXème comme Audouin ou Delpech on fait un remarquable travail même si certains points ont évolués suite à des travaux plus récents : si nous prenons le cas d’Audouin il n’a pas écrit par rapport aux travaux de ses prédécesseurs mais par rapport aux sources d’époque.

* je sais que ça fait couler de l’encre chez quelques un, cet hiver je ferai un petit mémo sur le sujet car j’avoue avoir un faible pour la logistique et la stratégie des armées de la première moitié du XIIIème qui je pense étaient très organisées. Le but sera de mettre en relief la stratégie globale (ex : type de formation dans quel situation et avec quelle logistique).

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Aurélien » Dim Avr 25, 2010 11:40 am

Je suis en train de travailler sur l'essai d'Audoin.
Effectivement, je suis surpris par la modernité de son propos.
Le Delpech n'est pas encore à portée de ma bourse (400€ sur le net) mais je compte bien faire un saut dans une librairie parisienne pour me le trouver.

Je rejoins ce que tu dis Ranulf sur organisation et réactivité des piétons.
Maintenant, reste à voir la question de la représentativité. Pour moi, parmi les sergents, on est (encore) dans la surreprésentation de l'épée. Car, à chaque fois que je regarde des enlus ou lis des récits de soldats réguliers, il apparaît qu'ils sont de friands (et efficaces) utilisateurs de lances.

A voir :)

Par contre, pareil, pour moi, le haubert est encore sous-représenté. Ne serait-ce que parce qu'on est censé reconstituer des corps d'armées royale et impériale, pas franchement la lutte du ptit péquin du coin. J'ai d'ailleurs un article qui parle d'une période un poil antérieure et qui proclame que c'est Richard Coeur de Lion qui achète un équipement homogène pour ses soldats réguliers. Je n'ai pas l'équivalent pour Philippe II ou les armées d'Othon encore. Recherches en cours ;)

Mais je vais déjà retrouver l'article et la source, ça peut toujours donner un ordre d'idée.
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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede RANULF » Dim Avr 25, 2010 12:03 pm

N'achète surtout pas Delpech à 400€, tu peux trouver les 2 volumes pour 100€ en librairie spécialisée (port compris). Je vais essayer de te retrouver l'adresse, je te l'enverrai en MP l'histoire que l'on accuse pas le forum de faire de la pub.
Dans la mesure où les piétons sont surtout utilisés pour protéger la cavalerie il me semble logique que les lances et arbalètes soient bien représentées (avec une forte majorité de lances), mais en aucun cas ces armes ne seraient être exclusives : là nous pêchons peut-être un peu. En effet une lance peut casser durant le combat, une lance est inutile au corps à corps, si la cohésion des rangs est rompue mieux vaut avoir une épée, une hache, une masse ou un simple gourdin (on en voit sur certaines sources).
Idem pour les grandes dagues, nous n'en portons pas, mais là de mémoire elles sont interdites pour raison de sécurité.
Content qu'Audouin t'inspire, perso j'ai adoré !
Pour l'orga des armées, rapidement Philippe préfère que les villes et villages paient une taxe de guerre au lieu de lui envoyer des hommes...
C'est beaucoup plus souple et ça permet une certaine "professionalisation" des troupes : sur ce point en France le début du XIIIème est une époque charnière.

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede RANULF » Dim Mai 02, 2010 9:14 am

En 1191, après la prise d’Acre les croisés marchent vers Jérusalem et longent le littoral jusqu’à Jaffa. Beha-ed-Din « secrétaire » de Saladin a suivi ce dernier lors de cette campagne. Son témoignage me semble intéressant, même si le contexte est un peu différent. Il concerne plusieurs topiques mais je préfère ne pas le saucissonner. Donc, Beha-ed-Din dit que : « L’infanterie, rangée devant la cavalerie, se tenait ferme comme un mur, et chaque fantassin portait un habit de feutre très épais et une cotte de mailles tellement large et forte que nos flèches n’y faisaient aucune impression. Ils tiraient sur nous avec de fortes arbalètes blessant nos chevaux et leurs cavaliers. J’ai vu de ces fantassins Francs qui avaient d’une à dix flèches fichées dans le dos, et qui marchaient de leur pas ordinaire, sans quitter les rangs. La cavalerie était placée au centre de l’infanterie, et n’en sortait que quand elle devait charger » ou encore « leurs fantassins, qu’ils avaient placés comme une muraille pour couvrir leur cavalerie, employaient leurs arbalètes et leurs arcs avec tant d’adresse que personne ne pouvait s’approcher d’eux »

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Isarn » Dim Mai 02, 2010 9:45 am

Là, vous parlez de soldats professionnels, armés et équipés par leur seigneur.

Si on regarde les effectifs de la bataille de Bouvines, il semble que de tels corps n'étaient tout de même pas la majorité (les sergents massiers de Philippe Auguste par exemple, qui, eux, dépendaient directement du roi). Pour le reste, il s'agit de troupes venant avec leur seigneur, qui devaient compter quelques soldats pros mais surtout beaucoup de ce qu'on appelle les "milices communales" (qui sont, dites moi si je me trompe, des citoyens lambdas équipés à l'arrache et sous-entraînés ... donc plutôt gambison et pique).

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede RANULF » Dim Mai 02, 2010 10:44 am

Effectivement, à priori il s'agit plutôt d'une armée dite "professionnelle" pour cet exemple. Ce que je trouve également intéressant c'est la citation du feutre pour les gambisons qui à priori semblent être assez épais.
J'aurais tendance à nuancer les "milices communales (qui sont, des citoyens lambdas équipés à l'arrache et sous-entraînés ... donc plutôt gambison et pique)" : cela devait recouvrir des situations différentes selon l'emplacement (frontière ou non, etc) et la richesse des villes. L'exemple de l'attaque de Mantes ou plutôt de la tentative d'attaque est assez intéressant de ce point de vue puisque d'après Guillaume le Breton, les habitants sortent de la ville et se mettent en ordre de bataille à l'approche de l'armée d'Henri. Lorsque Philippe entre dans la ville ils restent à ses côtés et ce dernier "se réjouit et leur rend grâces de les trouver aussi bien armés, hors de leurs portes, et disposés à se défendre". En parlant de Montrichard le même chroniqueur dit : "il employa beaucoup de temps avant de parvenir à s'en rendre maître, car la position naturelle de ce lieu, placé dans un étroit défilé, et défendu par des murailles élevées, et de plus la troupe valeureuse des bourgeois qui l'habitent, faisaient qu'il était impossible de s'en emparer en peu de temps". A l'inverse, parfois les villes sont abandonnées sans combattre ou presque comme Tours. D'après G le Breton PHILIPPE "parcourt en toute hâte le Vermandois et le pays de Boulogne, distribue des armes et des guerriers dans les châteaux et dans les villes, afin de mettre les frontières du royaume à l'abri des ennemis et du voisinage". A noter qu'à Mantes c'est également un proche de Philippe qui commande les troupes de la ville . Le règlement de certaines villes imposent aux combattants certaines pièces d'équipement en fonction de leurs revenus. La réalité est multiple, c'est "po" simple tout ça :crazy:

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Reinhardt » Dim Mai 02, 2010 3:28 pm

Je connaissais ce passage, mais je n'avais jamais tilté sur le fait qu'il y soit fait mention que les piétons sont en haubert ! Très intéressant !
Quant à des soldats pros, j'émets de grosses réserves : c'est le contexte des croisades : en quoi ces piétons-là, qui suivent leurs seigneurs à la guerre en Terre Sainte, seraient-ils différents de ceux qui suivent leurs seigneurs à la guerre royale du roi de France ?
D'autre part, si côté français il est clairement fait allusion aux milices cummunales, en revanche côté coalisé la majorité des piétons sont des soldats de métier.

Ensuite, tous côtés confondus, j'ai beaucoup de mal à imaginer un seigneur qui entretient un château, qui a des droits de justice, perçoit des impôts, etc. entretenir une troupe de soldats sous-équipés avec à peine un gambi et une lance. Ce qui coûte cher, c'est pas l'équipement, c'est le fait d'entretenir une troupe : les soldats sont logés, soldés, probablement partiellement entretenus, soignés par leur seigneur.
Je verrais plutôt les soldats de métier, ceux qui suivent leur seigneur, peu nombreux (une dizaine, douzaine environ) mais mieux équipés que gambi-lance...

Quant aux villes, elles imposent en effet un minimum d'équipement selon le niveau de revenu, et les hauberts y figurent assez rapidement. De même que dans l'ordonnance d'Henri II Plantagenêt.

Et à ce sujet, les GMA, spécialistes s'il en faut de la milice de Saint Maur, les hauberts, épées et équipements un peu "lourds" sont classés à partir de quels revenus, et y a-t-il une notion de la valeur financière desdits équipements ? Ca peut aussi être utile pour faire avancer le Schmilblick, ça !
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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede RANULF » Dim Mai 02, 2010 3:53 pm

A priori l'arme de base du piéton c'est la lance ou l'arbalète : ce qui ne l'empêche pas de porter d'autres armes pour le combat rapproché. Mais on arrête pas une charge de cavalerie avec une épée, hors au XIIIème les fantassins ont pour rôle essentiel d'empêcher les charges de cavalerie adverse tout en protégeant la leur (lui permettant ainsi de se reposer entre 2 assauts). D'ailleurs lors des croisades la tactique des locaux consiste à séparer la cavalerie de ses piétons avant de l'attaquer en "flot continu" : une unité charge et se repli (en décalant légèrement sa route de retraite) tandis que la suivante lance déjà un nouvel assaut, sans la protection des piétons la cavalerie des croisés est alors soumis à des assauts permanents (tandis que ses assaillants peuvent faire relâche entre 2 assauts).
Reinhardt sur l'ancien forum nous avions parlé de l'équipement des troupes urbaines en Champagne en fonction des revenus.

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Ernoul » Dim Mai 02, 2010 4:26 pm

http://www.guerriersma.com/contenu/reco ... tation.htm

Pour la milice de st maur voici les statuts:

-Moins de 10 livres : Pas de protection de corps/Pas de protection de tête/arc et flèches/petit couteau
-A partir de 10 livres: Pas de protection de corps/chapeau de fer ou chapeau de peau (cervelière de cuir/ensis et petit couteau ou 1 fourche ferrée
-A partir 30 livres : 53 sujets de l’abbaye/gambison ou cotte gamboisée/chapeau de fer/ensis et petit couteau
-60 livres et plus : 12 sujets de l’abbaye/Haubert (lorica) ou haubergeon/chapeau de fer/épée seule ou ensis et grand couteau

Attention, on est troisieme quart du XIIIeme

ps: une livre fait 240 deniers parisis si je ne m'abuse. (12x20)

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Yvan de Tergate » Lun Mai 03, 2010 11:34 am

Reinhardt a écrit:Quant à des soldats pros, j'émets de grosses réserves : c'est le contexte des croisades : en quoi ces piétons-là, qui suivent leurs seigneurs à la guerre en Terre Sainte, seraient-ils différents de ceux qui suivent leurs seigneurs à la guerre royale du roi de France ?


Tout à fait d'accord. Un seigneur qui part en croisade ou en guerre pour le Roi de France part à priori avec les mêmes hommes. Par contre, les milices communales participent-elles aux croisades de la fin du XIIe et début du XIIIe ? Pour la troisième croisade peut-être, le Roi y participant lui-même, il aurait sans doute pu mobiliser les milices des villes sous son contrôle. Mais en dehors de cela, il ne me semble pas qu'un seigneur puisse mobiliser une milice pour la croisade. Quelqu'un en sait plus sur la question ?

Ainsi, dans le texte cité par Ranulf il pourrait s'agir de sergents servant directement des chevaliers et non de miliciens. Montrant ainsi un équipement plus "lourd" pour les hommes d'un seigneur que pour des miliciens. Ce qui serait au final assez logique.

P.S. : et concernant la milice de St Maur, le milicien à moins de 10 livres, il allait vraiment combattre avec sa b...e et son couteau ! Pauvre gars, de la chair à chevalier ! [img]images/icones/icon9.gif[/img]
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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Le Goupil » Lun Mai 03, 2010 2:06 pm

Reinhardt a écrit:Ensuite si on recoupe avec les sources visuelles (statues, enluminures, vitraux) : les armes d'hast et les gambesons apparaissent sous représentés par rapport à nos reconstitutions modernes. On représente plus souvent le soldat à pieds vêtu de mailles et armé d'une épée que vêtu d'un gambeson et armé d'une lance. Dans la bible en skis par exemple, je m'étais amusé à faire un comptage, et 50 % environ des soldats à pieds sont représentés en mailles. L'arme la plus représentée entre leurs mains est d'ailleurs l'épée.

Certes, mais beaucoup de ces soldats à pieds sont en réalité des chevaliers démontés ! De même que sur les autres représentations, le côté maille+épée renforce le symbole du guerrier. Or, on est quand même le plus souvent, dans ces sources iconos là, dans un registre symbolique, donc bon...
;)

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Bouchard » Mar Mai 04, 2010 12:18 pm

Comme l'a rappelé Ernoul, une milice est susceptible de comporter de fortes disparités dans la qualité des équipements. Dans le cas de la milice de saint Maur on passe du haubert avec épée à l'arc et archer "à poils".
Donc un milicien n'est pas forcément sous équipé, mais les mieux équipés sont la minorité la plus riche. Certainement aussi la mieux formée car qui dit épée, dit forcément une certaine maîtrise de son usage (c'est une arme spécialisée contrairement au fauchon par exemple ou la fourche).

Il ne faut pas non plus perdre de vue qu'une milice est constituée pour protéger une ville/région des attaques des bandits de grands chemins et autres malandrins qui mettent à sac villes et campagnes. Le cas de saint maur est révélateur puisque ce sont les attaques des étudiants qui ont largement justifié la création de la milice. bref, une milice protège des lieux précis et n'est pas une force d'occupation ou de projection comme on dirait de nos jours.

Il y a également milices et milices... Les milices brabançonnes sont réputées pour leur organisation et leur efficacité. elles sont créées par profession et par quartiers avec des "chefs" qui les encadrent. Rien de tel en "France" à ma connaissance...et les cas où les milices ont repoussé des attaques restent exceptionnels selon duby (La guerre au moyen-age).

Je pense qu'il n'y a pas nécessairement de règle et que la réalité (je ne dis pas vérité...) est plurielle et multiple. En effet, à la disparité des équipements des milices, leur disparité dans l'entrainement et aussi dans les effectifs, il faut ajouter qu'à partir du XIIIeme les vassaux répugnent à rejoindre l'Ost Royal (le chevalier devient un noble qui s'embourgeoise) et préfèrent payer la taxe (trou de mémoire pour le nom de de cette taxe). L'effectif disponible se trouve donc réduit et le Roi est obligé de puiser dans les "ressources humaines des villes" (donc les milices), quitte à fournir un complément de matériel quand cela est possible, ce complément pouvant être finacé justement par la perception de la taxe. Le roi fait également appel à des "stipendiers" qui sont des combattants rémunérés pour leurs services et généralement bien mieux équipés que le commun qui compose l'arrière ban qualifié de "mal armeis et tous nus".

Je sais que ça n'aide pas beaucoup :lol: mais je pense que cela permet une certaine diversité pour peu que l'on s'intéresse sérieusement à la question de cet arrière ban.

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede RANULF » Mar Mai 04, 2010 6:35 pm

Il est vrai que certaines chartes communales fixent le périmètre d’action maximale ! Telles celles de Chaumont, Poissy et Pontoise dont les miliciens ne peuvent être contraints de combattre au-delà de la Seine et de l’Oise. Ceux de Dun et de Bourges ne combattent pas en dehors du Berry. Ceux de Lorris doivent pouvoir rentrer chez eux le soir même ! En fait, les villes et communes de l’ancien domaine royal doivent le service militaire au roi. Mais dans la première décennie de son règne, lorsqu’il octroie les chartes communales, ce service est souvent limité à la défense locale afin de s’attirer les faveurs des populations. Progressivement, à partir des années 1190, il commence à revenir sur ces limitations. Tels Grandelin et les villages environnants en 1196 ou Crépy-en-Valois en 1215 contraints de fournir « ost et chevauchée » dans tout le royaume comme les autres communes royales ou de convertir ce service en taxe de guerre. Dans ces conditions, on comprend aisément l’intérêt de demander le paiement d’un impôt plutôt que la fourniture d’un contingent.
D’après les comptes de 1202, 64 villes et abbayes, réparties entre les 4 principaux baillis, versent des sommes imposées pour un total de 26.453 livres en remplacement de leurs sergents. Pour un peu plus du tiers d’entre elles (25), le nombre de sergents correspondant est indiqué ainsi que la durée du service : 3 mois. Entre 1194 et 1202 les exigences augmentent : à priori elles sont liées au contexte politico-militaire. Ainsi en 1202, le service est de 5 mois alors qu’en 1204 il est de 4 mois. Dans tous les cas, dès qu’il dépasse 3 mois le roi paie les troupes mises à disposition par ses villes. Mais comment est calculée la taxe versée par les villes et les communes ?
En fait, elle semble basée sur l’ancienne amende royale Carolingienne (bannum dominicum) payée par tout contrevenant aux ordres du souverain, y compris le service d’ost. A l’époque Carolingienne cette amende se monte à 3 livres ou 60 sous. Philippe II se basera donc sur cette somme, sachant qu’un sergent est payé 8 deniers par jour, donc 240 deniers ou une livre par mois, on arrive à un total de 3 livres pour 3 mois : pragmatique, typiquement Philippien…
La levée en masse semble avoir été exceptionnelle. Tous les hommes libres n’étaient pas astreints au service d’ost. A priori seuls les volontaires capables de se racheter font partie du contingent mobilisable. Tant que la durée de la campagne est inférieure à 3 mois, c’est la ville qui paie la troupe, passée cette durée c’est le roi. Pour les villes, il est donc plus intéressant d’envoyer des hommes plutôt que de payer une taxe si la campagne de l’année est inférieure à 3 mois, mais pour l’administration royale le paiement de la taxe est beaucoup plus rentable dans ce cas là…
Toujours d’après les comptes de 1202, il semble que les nobles peuvent aussi payer une taxe pour remplacer le service d’ost ! Cette taxe varie de 6 à 12 livres, mais la durée obligatoire de service n’est que de 40 jours (solde journalière d’un chevalier 6 sous). La somme de 6 livres représente la solde d’un sergent à cheval pendant 40 jours. Celle de 12 livres représente celle d’un chevalier soient 6 sous par jour pendant 40 jours. En 1202, elle ne rapporte que 858 livres : à priori les nobles préfèrent servir. Passé le délai des 40 jours le roi a la possibilité de les solder pour tenter de les garder à son service.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, il semble que les mercenaires, (mercatores) encore appelés routiers (ruptarii) ou cottereaux, soient très peu nombreux dans l’armée de Philippe II. Ils sont commandés par le fameux Cadoc, sire de Gaillon, chevalier banneret de son état. Le nombre exact de ses hommes est difficile à estimer car leur chef recevait une somme annuelle en 3 termes pour la solde de ses hommes (3.920 livres Parisii en 1202). Donc Guillaume Le Breton n’exagère pas quand il dit que Cadoc reçoit 1.000 livres par jour…Il faut juste préciser... de paie : mais comment était-elle répartie ? Si on se base sur la solde officielle des sergents de l’armée royale, on arrive à 300 hommes. Mais certains historiens pensent que ces hommes étaient sous payés. Ces troupes avaient une réputation redoutable. Cadoc est le premier à planter sa bannière sur une tour lors du siège de Château Gaillard en 1203. Il repousse les assauts de Richard Cœur de Lion qui sera blessé lors du siège de Gaillon…
A priori Philippe II semble avoir utilisé les Brabançons et autres mercenaires Allemands au début de son règne. Leur manque de discipline, leur versatilité et leur manque d’implication l’inciteront à préférer l’utilisation de troupes locales et à mettre sur pied une armée "permanente".
Dans son armée, les registres citent des sergents à pied (servientes pedites) et des sergents à cheval, des arbalétriers à pied (balistarii pedites) et des arbalétriers à cheval (balistarii equites) ainsi que des chevaliers.

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Re: Epée et haubert : sous représentés ?

Messagede Reinhardt » Mar Mai 04, 2010 6:41 pm

Totalement d'accord sur la diversité des situations, Bouchard.

Je pense qu'en l'état des sources d'actions militaires, il faut distinguer les bagarres entre villes et villages (miliciens mal équipés, qui se battent avec leur b...e et leur couteau), les guéguerres de seigneurs avec des soldats équipés de bric et de broc (gambi mélangés à mailles, ou rien du tout, bref de tout et n'importe quoi selon les moyens engagés) et les guerres royales, plus rares, où on prendra des combattants plutôt professionnels, plus chers, mercenaires, soldats pros, et mieux équipés.
En gardant à l'esprit que ces guerres royales, qui se soldent -ou non- par une grande bataille, sont autrement plus rares que les autres escarmouches, sièges, guéguerres et p'tites bastons de seigneurs du coin. Quand on étudie le coût de ces grandes guerres, on comprend pourquoi !
En revanche dans ces grandes opérations les combattants peuvent être mieux équipés, car plus professionnels (sauf dans le cas présent côté français, vu qu'il y avait les milices communales...et encore, j'aimerais bien connaitre leur proportion)
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